4.06.2016

Les forêts nourricières: clés du succès de la civilisation Maya

Cela fait des années que l'archéologue Anabel Ford soutient que les anciens mayas savaient très bien gérer l'environnement de leur forêt tropicale à leur avantage. Ils arrivaient à nourrir d'importantes populations même après la période où de nombreux archéologues ont suggéré le déclin Maya au cours des 8ème et 9ème siècle après JC.

Un jardin forestier Maya. Courtesy BRASS/El Pilar

Elle remet en question les théories populaires, longtemps soutenues par de nombreux scientifiques, selon lesquelles les mayas ont commencé à décliner en raison de la surpopulation et de la déforestation pour augmenter la production agricole, aggravant ainsi la sécheresse et le changement climatique.

"A l'époque, il n'y avait pas de déforestation extensive" affirme Ford. Son raisonnement repose sur des années de recherches sur les anciennes pratiques de culture de "jardins forestiers", une méthode d'agroforesterie durable utilisant la technique agricole "Milpa". Il s'agit d'un paysage biodiversifié et polycultivé, dominé par les arbres, et géré par de petits agriculteurs dispersés. Ils emploient des cycles naturels et maximisent l'utilité de la flore et faune native.

Ses racines remontent avant l'apparition de la période Maya Préclassique, et cela fonctionnait en transformant une zone d'une forêt canopée en un champ ouvert. Une fois nettoyé, il était dominé par des cultures annuelles, transformant l'endroit en un jardin verger entretenu; puis retour à une forêt à canopée fermée, et le circuit recommence. "Contrairement aux systèmes agricoles européens qui se sont développés à peu près à la même période, ces champs n'étaient jamais laissés à l'abandon, même lorsqu'ils étaient boisés" explique Ford, "Ainsi, il y avait une rotation de plantes annuelles succédant à des étapes de vivaces forestiers que l'homme gérait avec attention tout au long de ces phases".

Elle explique le processus et ses implications en détail dans son livre, Maya Forest Garden: Eight Millennia of Sustainable Cultivation of the Tropical Woodlands, co-écrit avec Ronald Nig, professeur au Centro Investigaciones y Estudios Superiores en Antropología Social (CIESAS) au Chiapas, Mexique.

Le livre résume des années de recherche évaluant des données archéologiques, paléoenvironnementales, agricoles, botaniques, écologiques et ethnographiques au Guatemala, Mexique et Belize. Elle se penche aussi sur le grand centre Maya d'El Pilar (voir à ce sujet: Les archéologues découvrent une mystérieuse citadelle Maya)

"La recherche écologique, agricole et botanique sur la forêt Maya démontre que c'est en fait un jardin bariolé dominé par des plantes à valeur économique, et donc fortement dépendantes des interactions humaines" ajoute Ford. Ainsi, "la co-création, des mayas et de leur environnement forestier, était basé sur une stratégie de gestion des ressources donnant ce que l'on appelle le jardin-forêt Maya".

Le cycle de Milpa, depuis les champs de maïs aux plantes vivaces puis retour à la forêt. Courtesy BRASS/El Pilar

De plus, Ford souligne que le cycle Milpa est à l'origine de la forêt qui est une création et un "monument" du peuple Maya. "La forêt Maya, que l'on pensait être une jungle vierge et sauvage, est en réalité le résultat des activités humaines préhistoriques, coloniales et récentes" écrivent Ford et Nigh dans leur livre.


En d'autres mots, la gestion et mise en forme des éléments du paysage forestier, avec le cycle de Milpa, en un environnement humain, a été bénéfique en termes de nourriture, d'abris, de plantes médicinales et autres besoins pour une population ne cessant d'augmenter. Les mayas sont devenus les créateurs de leur environnement tropical, et de la jungle elle-même.

Plus important encore, en raison de ses techniques durables et de renouvellement, le cycle de Milpa est devenu la clé de la longévité de la civilisation Maya longtemps après "l'effondrement" de la période Classique.

Ford et Nigh concluent: "Lorsque les crises politiques frappèrent la société Maya au cours de la période Classique, la population s'est en grande partie retirée dans les jardins forestiers, abandonnant les grands centres et leurs élites".


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